Approcher l’espace, « High Life » de Claire Denis

Dans l’espoir d’échapper à la peine de mort, un groupe de condamnés accepte de s’envoler dans l’espace. L’ordre de mission parle de récupérer l’énergie rotationnelle d’un trou noir. C’est sans compter que le contrat comporte une clause cachée. De cette hypothèse de science-fiction, Claire Denis ne garde à l’image que ce qui intéresse les prémisses d’une expérience humaine à la fois singulière et éclairante.

High Life dors

L’espace, si c’est cela que promet l’aventure, ne s’atteint jamais, le seuil, sans cesse reporté, est celui du dehors ; le voyageur, lui, reste à l’intérieur, toujours enfermé, que ce soit dans son vaisseau ou dans son scaphandre.

Tendre, vorace et ardent

Étranges et accueillants, les premiers plans du film décrivent un jardin. On y voit s’alanguir des citrons mûrs et des tomates d’un rouge épanoui dans une abondance humide et verte où se distinguent aussi quelques salades reposant mollement sur un sol gras. Décor familier s’il en est, à ceci près qu’il semble faux. Il manque, en effet, à ce tableau d’une pénombre paisible, comme une profondeur de champ, un ciel, ne serait-ce qu’une brise légère – quelque chose, somme toute, de vivant et d’intrépide qui en ferait le vrai jumeau d’un potager terrestre. Car ce bout de terrain ne surgit pas seulement hors-sol, il voyage dans l’espace. Pour l’équipage du vaisseau qui l’abrite, le bénéfice concret de ce petit miracle technologique est l’autonomie alimentaire, la garantie de ne jamais connaître la faim quelle que soit la durée de la traversée.

High Life jardin 2

Au cœur de la nuit stellaire, ce qui ressemble à une irruption édénique offre un indice du sentiment incertain qui relie les voyageurs à leur lointain passé sur Terre. L’au-delà, l’idée d’un autre monde, est un argument aussi bien qu’un état de fait : la profusion nourricière et la possibilité de la reconduire à l’infini signalent aux condamnés le caractère ambigu de leur sursis. Toutefois, à l’inverse de ce que raconte Tarkovski, cinéaste dont Claire Denis convoque ici les ambiances (Stalker, Solaris), il y a très peu de nostalgie dans High Life, très peu d’envie de revenir à la vie d’avant. La Terre, dans le souvenir qu’en garde le « héros » du film, Monte (Robert Pattinson), suinte la mort, la tristesse et l’abandon. Un passé qui se donne dans des teintes aussi blafardes rend l’éclairage artificiel presque excitant. Bleues, rouges, blanches ou vertes, les lumières captieuses du vaisseau semblent répondre à un code pulsionnel inédit qui lui-même relativise l’idée que, dans un environnement synthétique, la vie s’éteint et le corps ne s’exprime pas.

Passée la porte du jardin, ce que transportent les couloirs est d’un contenu vorace et ardent. C’est qu’en effet, la mission possède une clause cachée que les prisonniers ne vont pas tarder à découvrir. Sous le commandement du Dr Dibs (Juliette Binoche, blouse blanche, longue crinière charbonneuse), l’équipage composé pour moitié de jeunes femmes belles, et pour l’autre de jeunes hommes beaux, doit se soumettre à un protocole expérimental de reproduction en captivité. A priori, les essais menés in vitro ne requièrent pas d’autre rapport sexuel que celui qui doit conduire ces messieurs à déposer leur semence dans des tubes dédiés à l’insémination.

High Life Juliette Binoche

High Life contact entre prisonniers

Quelle sorte de vie est-ce offrir à des personnes que définissent des désirs violents ? Qu’ils n’aient été que de simples délinquants ou de redoutables sociopathes, à tout prendre peut-être auraient-ils préféré la chaise électrique à une vie en semi-liberté, conditionnée à de constantes stimulations hormonales sans issue charnelle. Il faudra tout de même quelques années de galère collective avant que n’éclate la mutinerie mettant un terme au supplice de ces corps en pleine santé. De ce purgatoire proche de l’enfer, Monte et sa fille Willow (Jessie Ross) sont les seuls à ressortir vivants et intègres.

Le film commence à peine que déjà retentissent les pleurs de l’enfant. Willow a été laissée seule dans une pièce équipée de deux écrans. Sur le premier, elle peut suivre les gestes de son père qui, revêtu d’un scaphandre, tente une réparation à l’extérieur du vaisseau. Sur l’autre défilent les images en noir et blanc de rites funéraires d’un peuple disparu*. Mais bientôt, Monte est de retour auprès de la petite, et pendant une demi-heure, soit un quart de la durée du film, on assiste au quotidien, tour à tour enchanteur et désespérant, d’un homme isolé avec son bébé. Repas, sommeil, jeux, câlins, moments de détresse, apprentissages, premiers pas… tout se rejoue là comme à l’aube de l’humanité, dans la grâce insensée que répand autour de lui le regard d’un très jeune enfant.

Ne serait-ce le contexte improbable dans lequel il s’inscrit, ce tableau d’une intimité paternelle paraîtrait presque documentaire dans son absence d’événement. Et c’est sur cette toile tendre et peu spectaculaire que s’épanouit, d’abord de façon charmante, puis, progressivement, avec une monstruosité plus séduisante encore, une forme de conte, ce qui, chez Claire Denis, n’est rien d’autre qu’une façon de faire parler la forme.

High Life père et fille3

Palingénésie

Un conte est un itinéraire de pensée qui libère les êtres de leurs nuances. De même qu’une personne nous affecte par son rôle dans notre vie davantage que pour ce qu’elle est, le conte ne cherche pas à se confronter au réel, sa vérité lui suffit. Cette vérité, dans High Life, murmure qu’il y a des anges et des sorcières, des chevaliers sans armure et des vierges fécondes. Selon cette alchimie émotionnelle, nulle puissance ne s’oppose à une autre, il y a plutôt des fonctions qui s’échangent, composent, dérivent.

High Life lait

Le conte dit aussi que l’exil est une sorte d’emprisonnement. L’infini du dehors et l’exiguïté du dedans s’agencent en une trajectoire commune de possibles que le film égrène doucement : mort, folie, régénération. L’enfant et le jardin sont les deux termes qui dénouent la dialectique du désespoir.

On en revient ici à l’hypothèse selon laquelle un trou noir possède une énergie propre, dite rotationnelle (processus de Penrose). Serait-il réducteur de considérer que l’argument scientifique du film pourrait n’être qu’une métaphore un peu élaborée de la « lumière au bout du tunnel » ? Et quand cela serait, l’aura du règne cosmique alliée à la celle du règne végétal sous la forme à peine domestiquée du jardin, se dépose comme un halo sur le récit qui n’est pas celui d’un au-delà réconfortant. De même, le couple père-fille, quoique pas forcément incestueux, transgressif selon une morale terrestre, bouscule l’imaginaire pourtant sombre et suffocant des scènes antérieures. Lorsque toute l’horreur humaine a été consommée, que peut-on ressentir ? Que reste-t-il à faire ?

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Contour du vertige

J’ai approché High Life avec une idée simple : créer une sorte de musique hasardeuse, qui peut exister dans le vide, à l’image des constellations, autour d’une structure toujours cachée des musiciens, qui du coup n’avaient qu’un minimum d’informations, voire aucune, sur ce qui était enregistré. — Stuart Staples

« Parasites » : tel est le terme employé par Monte pour nommer les images qui lui reviennent encore de la Terre. Ce n’est plus dans cette direction-là qu’il regarde désormais, depuis que Willow est à ses côtés. Théoriquement il y a un au-delà dans High Life, représenté comme un point d’embrasement du corps et de l’esprit. Ce que cet horizon n’est pas, nous le comprenons bien : il n’est ni religieux ni réparateur, un retour sur Terre n’étant assurément ni envisageable ni souhaité. Positivement, l’au-delà s’apparente à une musique. Souvenons-nous que Claire Denis a passé son enfance en Afrique : « High Life, ainsi désigne-t-on la musique de la côte Ouest du Nigeria, du Ghana, du Cameroun anglophone, une musique issue du jazz. Ça colle bien avec l’idée d’un là-haut, d’un au-delà des étoiles. » Et pour, non pas contredire, mais ouvrir un peu plus encore la poésie du paradigme, la bande-son du film, signée Stuart Staples, collaborateur fidèle de la réalisatrice depuis des années, offre l’exemple d’un de ces agencements sonores dont la nature exacte échappe à l’oreille de l’auditeur. Comme la lumière offusquant l’intérieur du trou noir, une inversion opère au sein de l’espace acoustique, amenant une structure complexe à représenter le vide. Et c’est la voix de Robert Pattinson qui nous accompagne dans le générique de fin. Le morceau intitulé Willow rêve, tout éveillé, à la Terre, lui adressant un adieu de la part d’une personne qui n’y a jamais séjourné.

 

Le trop-plein d’attentes et de souvenirs

Sous un vernis de science et de technologie, les questions que posent les récits de l’espace se recentrent le plus souvent autour de la psyché. Poussant la logique un cran plus loin, Claire Denis use du geste de science-fiction comme d’une mythologie pour atteindre ce qui l’intéresse: l’aventure intérieure.

Ce que la science-fiction ne dit généralement pas, c’est que le quotidien du voyageur de l’espace n’a pas grand-chose à voir avec la grande aventure promise. Celle-ci n’est que le fruit intéressant d’un imaginaire qui s’est forgé loin des étoiles.

High Life equipage

L’espace, si c’est cela que promet l’aventure, ne s’atteint jamais, le seuil, sans cesse reporté, est celui du dehors ; le voyageur, lui, reste à l’intérieur, toujours enfermé, que ce soit à dans son vaisseau ou dans son scaphandre. La vitesse phénoménale à laquelle il se déplace, il ne la sent pas. Plutôt, il a l’impression de reculer. Le cosmos n’est pas avare en illusions trompeuses. Exonéré du poids de son corps, le voyageur se sent néanmoins lourd d’une langueur inconnue, rien ne va de soi dans cet au-delà du ciel, ni respirer ni se mouvoir, manger, dormir, le moindre besoin physiologique nécessite d’avoir recours à des artifices. L’organisme affolé, ne sachant plus remplir ses fonctions naturelles, penche vers l’excès tandis que le guette le risque de la dépense furieuse.

Si le voyageur a de la compagnie, il se sent seul ; s’il n’en a pas, le trop plein d’attentes et de souvenirs le déborde. Et cela, parce que la répétition de journées toutes semblables les unes aux autres annule la sensation du temps, faisant se rejoindre dans un même présent passé et avenir, réel et fantasme. Le goutte-à-goutte des humeurs, larmes, sang, sperme, lait, réinscrit l’écoulement des jours sur une partition organique. Par cet effritement progressif des repères anciens, l’esprit qui peu à peu s’acquitte de sa dette terrestre, charnelle et morale, n’est-ce pas finalement le seul événement qui concerne le voyageur : un abîme, un autre départ ?

 

 

 

And your dreams, they stretch beyond the clouds / And past the moon, into the stars / Do you feel the rushing forward / Though you’re standing still? Willow, are we rushing forward, are we standing still? Willow, does this love hold a destination? Willow, do you feel the wind run through your hair? Willow, do you feel the sun upon your back? A lover’s hand? Breath . An abyss.
[Et tes rêves se déploient, au-delà des nuages, de la lune, ils vont jusqu’aux étoiles. Immobile, tu sens ce mouvement Willow ? Ce mouvement, est-ce nous, immobiles ? Willow, cet amour, où va-t-il ? Willow, le vent dans tes cheveux, tu le sens, Willow ? Tu sens le soleil, sa caresse dans ton dos ? La main de l’amant, son haleine ? Un abime.] Stuart Staples, Willow

 

* Il s’agit d’un film d’Edward Sheriff Curtis (1868-1952), photographe ethnologue américain qui, un peu à la manière de Flaherty, s’acharna, par de soigneuses reconstitutions, à conserver des traces de vies condamnées à disparaître. Ici en l’occurrence, des Amérindiens.

** on doit la représentation graphique du trou noir au plasticien islandais Olafur Eliasson, connu pour son travail sur la lumière et ses mises en scènes spectaculaires de phénomènes naturels (cf The Weather Project, Tate Modern, 2003)

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Discorde diluée dans la lumière

Hirokazu Kore-Eda, « Still walking », Japon, 2008 (durée : 1h50)

Trop souvent, la représentation de la discorde procède d’une thèse dont les personnages (et à travers eux : le public) sont les arguments. Une narration venant à épouser la montée de la querelle nourrit un déterminisme pathogène, comme si chacun devait porter en soi – incarner – une partie de ce grand tout qu’est la discorde, matrice formelle, génératrice de sens et d’émotions ; il s’en faut de peu qu’elle ne devienne un système totalisant, fallacieux mais convainquant, fondé sur des prémisses inexactes : ces œuvres séduisent, forcent l’adhésion en soumettant le réel à une réduction spéculative. A l’opposé de ces drames qui camouflent leur arrogance en pathos, il existe un cinéma qui, loin de formaliser sans discernement une agressivité dont la cause n’est peut-être pas dans sa cible, choisit au contraire de la neutraliser, de l’atténuer par une diffusion lente. La discorde cesse alors d’être démonstrative, elle devient latente, insaisissable, elle échappe à sa propre définition. Ainsi dans Still walking, elle est comme diluée dans la lumière, elle infiltre la matière vague, indéfinissable, l’atmosphère si l’on veut, à la place du vide, elle est, en quelque sorte,  le négatif de cette incarnation paradoxale de l’espace et du temps qu’est la famille.

Parce que Kore-Eda, documentariste de formation, travaille cette fois, non plus sur base d’un fait divers (Nobody knows), mais sur des souvenirs personnels (sa relation avec sa mère), la question du point de vue se pose en des termes très précis, posture de l’artiste qui doit nécessairement se prendre à la fois comme sujet et comme objet d’étude, quel que soit le potentiel réflexif de l’argument initial,  se dédouble, se démultiplie : toute invention comprend une part de soi et une part de non-soi, seules les proportions varient… Ici Kore-Eda renonce à l’angle du créateur omniscient ; il semble assister à sa propre mise en scène, filme des corps, des lieux, des conversations comme autant de faits autonomes qu’il se garde, avec une retenue très japonaise, d’interpréter. A partir de là, Still walking offre l’apparence d’une toile unifiée, les scènes qu’on croirait prises sur le vif, spontanées, sincères se succèdent à un rythme égal, et c’est à peine si l’on se souvient qu’il s’agit d’une fiction, tant la distance qui sépare le cinéaste de ses personnages provoque, chez le spectateur, l’effet inverse, une vertigineuse identification.

C’est donc l’été dans une petite ville côtière, une réunion familiale tout à fait conventionnelle. On arrive les bras chargés de cadeaux, les enfants se taquinent tandis que les adultes, soucieux, méfiants, discutent, dissimulent mieux qu’ils ne s’informent, on cuisine, on mange un peu trop, on somnole, encore une promenade, quelques « vraies » conversations à la dérobée avant qu’on ne se sépare avec soulagement, avec amertume… Ce canevas familier, capté dans la durée, languide par moments, frémit d’un mouvement souterrain, comme si chaque scène portait son ombre, en bas, au niveau des racines de l’arbre généalogique. Quelques secousses de tourmente, lointaines, étouffées, une gravité sans cesse atténuée par la maîtrise des apparences.

L’unité du temps et de l’espace est illusoire. La famille est un concept de mémoire collective (le sang), et celle-ci, en l’occurrence, ne cesse de refluer vers une scène originelle, événement qui, par la force des choses, sert désormais d’exutoire à l’insatisfaction de chacun. Une mère inconsolable (et, par extension, aigrie, injuste, cruelle), un père déçu, deux enfants décevants : une fille encombrante, un garçon marié, comble de malheur (et de redondance) à une veuve, le voilà, cet arbre généalogique qui lézarde le présent. En pensées, les personnages sont ailleurs, dans une autre ville, dans une autre maison, où sur une plage toute proche du cimetière… Non que l’image nous entraîne dans leur conscience nomade, il n’y a ni flash-back ni autres échappées diégétiques, Kore-Eda s’en tient aux objets, aux échanges verbaux. Le téléphone, les photos, les disques sont des indicateurs suffisamment limpides. Sur les visages des petits-enfants se reflètent les tristesses et les rancœurs des parents, s’y concentrent déjà comme un surcroît de conscience, bien que heureusement dépourvue de déterminisme. Le long de ces trois générations circule discrètement un fil de transmission, avec ses ratés, ses faux raccords et ses rejets inespérés. Ici encore, Kore-Eda effleure sans nouer, désamorce les tensions, défait les causes et les nécessités. Entre ces mailles la lumière s’engouffre généreusement, la chaleur, l’océan…

A la tombée du jour, un papillon, incarnation fugitive de la perte, du manque, de l’exaspération, entraîne la famille dans le sillage de son vol affolé, tous divisés ils se précipitent en désordre, bras en l’air, animés de sentiments inconciliables, pourtant rassemblés en ce moment de grâce. Ainsi certains espaces, certains symboles impriment dans le réel des points de fuite qui annulent les différences, les conflits. C’est ici un papillon, le cimetière, mais aussi la nourriture, contrepoint substantiel à l’atomisation de la famille. Elle possède le pouvoir surnaturel de l’élément unificateur, ultime liant terrestre des êtres à la dérive. Au centre de cette journée ensoleillée, elle offre, sinon un démenti, tout au moins une constante atténuation de l’amertume. Dans le cahier des heures elle inscrit son rythme ancestral, régénère sa communauté de travail et de partage. Ces propriétés terrestres et spirituelles peuvent en retour indisposer ceux qui y sont contraints, comme si ce ciment naturel, sacré, devait désormais être rejeté, trop impérieux, jugé néfaste : la cérémonie s’achève, les personnages  prennent conscience qu’il leur est fait douce violence, et que l’ingestion  est pesante, lourde de prières et de devoirs ; la nourriture familiale exige de leur part un consentement qu’ils ne sont peut-être plus disposés à donner.

Ces sombres courants traversent le film en profondeur, sous une surface chatoyante où nul n’élève la voix, le silence dilate les solitudes et protège ceux qui s’y réfugient … Latence de la discorde qui libère ses sujets, latence de la mise en scène qui ouvre le réel, caresse l’ombre et l’invisible, à distance, assemble des tableaux, des tablées, une famille dont l’unité ne tient plus qu’à son imaginaire. Still walking est d’une trame difficile, de rancœur, de non-dit, de ressentiment ; puisque le détail à lui seul ne détermine en rien la totalité, un fil de nerfs et une étoffe de sang  tissent ensemble une toile de lumière.

Hirokazu Kore-Eda, « Still walking »

Filmographie de Kore-Eda